Les récents incendies dévastateurs au Chili, en Grèce, en Turquie, en Algérie et le Bootleg Fire aux États-Unis mettent en lumière les défis posés par ces catastrophes naturelles.
Outre les conséquences dramatiques pour les populations, ces feux ont un impact significatif sur l'environnement, contribuant à environ 20 % des émissions annuelles de CO2 dans le monde, selon les experts.
Partout dans le monde, la lutte contre la propagation des feux de forêts et feux de végétation repose principalement sur les ressources capacitaires d'extinction à disposition des pompiers.
Qu'il s'agisse de ressources humaines ou d'équipements terrestres et aériens, ces ressources ne sont pas illimitées.
D'après les statistiques 2022 de la DGSCGC (Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises) les sapeur pompiers français c'est 4 968 500 interventions par an soit 1 intervention toutes les 6 secondes, et avec en matériels équivalents habitant défendu :
un engin incendie pour 18 175 habitants
une ambulance pour 9 530 habitants
une grande échelle pour 52 633 habitants
un engin de lutte contre les feux de forêt pour défendre 48 km2 de surface forestière
Une approche simpliste pourrait être de faire une comparaison des coûts par habitant/personnes concernées. Alors essayons-nous plutôt à une mise en perspective de données factuelles en France :
Culture : 385€ /habitant (collectivités territoriales et Etat - Données observatoire des politiques culturelles)
Enseignement : 8 480€ /élève/étudiants (moyenne - données éducation nationale)
Protection sociale : 12 550€ /habitant (données DRESS) dont la santé 3 475€/habitant (INSEE)
Défense : 694€ /habitant (donnée calculée budget/nbre d'habitants)
Sûreté (police, gendarmerie, sécurité routière) : 356€ /habitant (donnée calculée budget/nbre d'habitants)
Sécurité civile : 90€ /habitant
Les ressources capacitaires sont donc limitées (certains experts diront insuffisantes voire en zone de rupture) et la question du financement de moyens supplémentaires est loin d'être résolue.
Face à ce manque de moyens et grâce à une expertise feu de forêt reconnue, la stratégie française a su s'adapter : plutôt que de courir après des ressources capacitaires supplémentaires, l'attaque précoce des feux naissants s'est imposée. La question de la détection est donc devenue centrale.
Les nouvelles technologies ouvrent de nouveaux horizons.
Différentes approches humaines et techniques sont explorées par la sécurité civile et par le secteur privé afin de relever le défi de la détection précoce : patrouilles, drones, centres de surveillance, réseaux sociaux, détection satellitaire, détection par caméra (RGB ou thermique), Intelligence Artificielle mais aussi objets connectés grâce au déploiement de différents systèmes de capteurs (IoT) en zone à risque.
Dryad Networks, ou comment un réseau de "nez connectés" permet de détecter précocement les départs de feux.
L'entreprise allemande Dryad Networks propose une solution appelée Silvanet, reposant sur des capteurs alimentés à l'énergie solaire suspendus aux arbres et un réseau maillé sans fil LoRaWAN.
Environ 500 capteurs (au coût d'environ 50 euros chacun) sont nécessaires pour couvrir une superficie de 10 km².
Ces capteurs intègrent une puce Bosch BME688 capable de détecter la composition gazeuse de l'air, notamment l'hydrogène, le dioxyde de carbone et le monoxyde de carbone.
Grâce à l’IA, ces capteurs peuvent évaluer précisément la nature d'un incendie (différenciation entre fumées feu de forêt et fumées de barbecue par exemple), permettant une détection en moins d'une heure, selon Dryad Networks. (Smoldering Phase)
Une fois "l'anomalie gazeuse" détectée par le réseau de capteurs, l'IA embarquée permet de la qualifier et de générer une alerte qui sera remontée sur le Cloud Dryad.
L'ensemble du dispositif déployé est autonome en énergie. Les capteurs et différents relais peuvent être alimentés grâce à l'énergie solaire (cellules photovoltaïques) permettant ainsi de larges déploiements en zones éloignées et en s'affranchissant de problématiques de maintenance.
Aux États-Unis, le projet BurnMonitor, impliquant l'INRIA et l'université de Berkeley, explore une approche similaire.
Le Moraga-Orinda Fire District (MOFD), basé à San Francisco, cherche un système de surveillance pour des zones sensibles, telles que des écoles situées en zones forestières. Des boîtiers ignifugés, équipés de capteurs résistant à des températures jusqu'à 125°C, sont déployés à intervalles réguliers pour former une "clôture virtuelle". Cette configuration permet au MOFD de détecter les incendies avec une distance de 50 mètres entre chaque capteur.
Ces avancées dans l'utilisation de capteurs sans fil et de l'IoT offrent une réponse proactive et technologique face à la menace constante des incendies de forêt, soulignant l'importance de l'innovation pour préserver nos écosystèmes forestiers.
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